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2012-08-27T09:35:00+02:00

Rothko et Castellucci

Publié par Wondermaman
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Avant-hier, j'évoquais le peintre Rothko, que j'ai découvert cette année grâce au spectacle de Romeo Castellucci The four seasons restaurant.

"The four seasons restaurant " est le nom d'un restaurant de New York dans lequel Rothko allait souvent déjeuner. En 1960, Rothko décide de décrocher ses oeuvres que le restaurant avait achetées, ne pouvant supporter les conditions dans lesquelles elles étaient vues.

Dans son spectacle, Castellucci interroge "le rapport entre représentation et négation de l'apparence qui, depuis la tragédie grecque, soutient tout rapport de l'homme occidental à l'image."

Rothko est né en Russie en 1903, émigre avec sa famille aux Etats-Unis en 1905, en 1970, il est retrouvé mort dans son atelier à New York, il s'est probablement suicidé.
Sa dernière oeuvre est un monochrome rouge qui laisse entrevoir une fine faille blanche.
Pour lui, l'une des fonctions - la fonction ? - de l'art est de dialoguer avec le néant.
Castellucci est dans cette même recherche d'une oeuvre "contemplative".

Rothko attachait un soin particulier à l'accrochage de ses toiles, pour lui, il ne conçoit pas des "tableaux" mais des "lieux" dans lesquels "le spectateur doit venir avec sa propre lumière".

C'est également le cas chez Castellucci et vous aurez deviné que c'est cela que j'aime chez lui, comme chez Rothko,  Fra Angelico,  Antonello de Massina et bien d'autres ...


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Dans le travail de Castellucci, le spectateur est déstabilisé :  noir, son grave et envoûtant des "trous noirs" de notre galaxie ou lied de Schubert à pleurer, jeunes filles en costume amish qui se coupent la langue, images très fortes.

Il n'y a pas d' "histoire", comme on dit.

10 jeunes filles jouent La Mort d'Empédocle - d'Holderlin .

Lorsqu'elles entrent en scène, très sages dans leur costume amish, elles se coupent la langue et les langues coupées sont ensuite mangées par un chien, comme pour symboliser l'artiste "livré aux chiens" ou les "voeux de silence" des monastères, ou le silence exigé dans les initiations comme dans les sectes, ou comme, tout simplement, l'impossibilité de communiquer.

Les jeunes filles viennent se livrer à un "mystère de la parole" - cette parole, c'est le texte d'Holderlin.
Elles l'interprétent avec une grâce infinie, une gestuelle qui fait penser à la gestuelle maladroite de jeunes filles de pensionnats lors d'un spectacle de fin d'année, mais cette gestuelle, extrèmement précise, est belle par sa netteté  et son innocence mélées.

On assiste, en fait, à un "Mystère" , une sorte de célébration religieuse, dont l'esthétique tient de L'Angelus de Millet  et du choeur antique, de la peinture hollandaise et de Raphaël.

Ces jeunes filles minces et brunes aux robes et tabliers de coton lourd à carreaux ont les cheveux tirés, des visages enfantins aux traits fins.
A la fin de La mort d'Empédocle, elles se mettent mutuellement au monde dans une chorégraphie qui représente la naissance. Une fois "née", chaque jeune fille est dévêtue par les autres et repart, nue -  libre ? dans un état de grâce originel.

A la fin du spectacle, un vol de plumes dessine l'Etna, volcan dans lequel Empédocle s'est jeté - renoncement choisi - le renoncement de Rothko retirant ses tableaux, d'Holderlin cessant  d'écrire, la mort d'Isolde chez Wagner.

Renoncement, contemplation, mystère : chez Castellucci comme chez Rothko, la fascination du sacré.



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